Vous négligez trop, mon cher et illustre confrère, une affaire importante et un ami qui prend vos intérêts plus que vous-même. Le petit livre en question[1] est débité sous le nom de M. le marquis de Belestat, et non de Beloste ; le résident de France à Genève s’était trompé sur le nom. L’ouvrage passe pour être savant et écrit d’un style vigoureux, dans le goût de celui de La Bruyère. Il se fait des partisans par son audace, et par des anecdotes historiques inconnues jusqu’aujourd’hui : pour moi, je crois la plupart de ces anecdotes fausses, et le style plus insolent que ferme et ingénieux.
Je suis lié avec le marquis de Belestat, jeune homme de mérite, académicien de Toulouse et de Montpellier. Je puis vous assurer qu’il n’est point l’auteur de cet écrit, et qu’il en est incapable de toute manière : je crois connaître l’auteur. Que vous coûterait-il de faire chercher, par l’abbé Boudot, à la Bibliothèque du roi : 1° si l’on trouve dans les premiers états de Blois que les états chargèrent leurs députés de dire au roi et à la reine mère que les parlements sont les états généraux du royaume au petit pied ; 2° s’il est vrai que, dans le contrat de mariage de Jeanne de Bourbon avec le père de Henri IV, elle prit le titre de majesté fidélissime.
Je supprime les autres anecdotes, sur lesquelles je suis assez instruit. Encore une fois, ne méprisez ni mon zèle, ni ces points d’histoire ; vous savez combien votre gloire m’est chère, je l’aime presque autant que la vérité ; mais certainement je ne prendrai pas la liberté de combattre pour vous sans votre ordre : je suis de ces officiers subalternes qui ne font rien sans l’agrément de leur général. Je vous embrasse très-tendrement, et vous souhaite toujours les jours les plus longs et les plus heureux, s’il y a du bonheur à nos âges.
Mon cher ami, le sieur Roset me paraît un virtuose. Il me mande que je suis fils d’Apollon et de Plutus ; mais, s’il ne