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ANNÉE 1768.

Je vous souhaite à tous deux santé et plaisir, et je suis à vous jusqu’à ce que je ne sois plus.

7279. — À M. CHRISTIN.
6 juin.

Mon cher ami, mon cher philosophe, en défendant la cause de la veuve et de l’orphelin, vous n’oubliez pas sans doute celle de la raison, et vous cultivez la vigne du Seigneur avec quelque succès, dans un canton où il n’y avait point de vin avant vous, et où tout le monde, presque sans exception, buvait de l’eau croupie. Vous savez qu’on veut persécuter notre ami d’Orgelet[1] pour de très-bon sel qu’on prétend qu’il débite gratis à ceux qui veulent saler leur pot ; mais je ne crois pas qu’on vienne à bout de perdre un honnête homme si estimable.

Je vous ai envoyé trois factums[2]… Je vous prie, quand vous n’aurez pas de clients à défendre au parlement de Saint-Claude, de lire ce procès auquel je m’intéresse, et de m’en dire votre avis. L’abbé Claustre s’appelle sans doute Tartuffe dans son nom de baptême. Il est clair qu’il est un maraud ; mais j’ai peur que ce maraud n’ait raison juridiquement sur deux ou fois points.

Lorsque je serai assez heureux pour que vous veniez me voir, je vous dirai des choses assez importantes.

Bonsoir, mon cher philosophe ; je vous embrasse de tout mon cœur.

7280. — À M. DANTOINE[3],
à manosque, en provence.
6 juin.

Ma vieillesse et mes maladies m’ont empêché, monsieur, de répondre plus tôt à votre lettre du 21 de mai ; mes yeux affaiblis distinguent à peine les caractères. Je suis peu en état de juger de la réforme que vous voulez faire dans les langues de l’Europe. Il en est peut-être de ces langues comme des mœurs et du gouvernement ; tout cela ne vaut pas grand’chose ; c’est du temps qu’il faut attendre la réforme. On parle comme on peut, on se conduit de même, et chacun vit avec ses défauts comme avec ses amis.

  1. Le Riche ; voyez lettre 7266.
  2. C’est-à-dire trois exemplaires d’un mémoire dans l’affaire de Claustre ; mais ce ne doit pas être celui qui est tome XXVIII, page 77.
  3. Cet auteur m’est inconnu ; il n’a point place dans le Dictionnaire de la Provence et du comtat Venaissin. (B.)