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Scène 6

Catilina, Céthégus, Lentulus-Sura


CETHEGUS

Faut-il donc succomber sous les puissants efforts
D’un bras habile et prompt qui rompt tous nos ressorts ?
Faut-il qu’à Cicéron le sort nous sacrifie ?

CATILINA

Jusqu’au dernier moment ma fureur le défie.
C’est un homme alarmé, que son trouble conduit,
Qui cherche à tout apprendre, et qui n’est pas instruit :
Nos amis arrêtés vont accroître ses peines ;
Ils sauront l’éblouir de clartés incertaines.
Dans ce billet fatal César est accusé.
Le sénat en tumulte est déjà divisé.
Mallius et l’armée aux portes vont paraître.
Vous m’avez cru perdu ; marchez, et je suis maître.

SURA

Nonnius du consul éclaircit les soupçons.

CATILINA

Il ne le verra pas, c’est moi qui t’en réponds.
Marchez, dis-je ; au sénat parlez en assurance,
Et laissez-moi le soin de remplir ma vengeance.
Allons… Où vais-je ?

CETHEGUS

Eh bien ?

CATILINA

Aurélie ! ah, grands dieux !
Qu’allez-vous ordonner de ce cœur furieux ?
écartez-la, surtout. Si je la vois paraître,
Tout prêt à vous servir, je tremblerai peut-être[1].

  1. « J'ai imaginé, écrit Voltaire à d’Argental, qu'il fallait que Catilina aimât sa femme ; il ne l’aime, à la vérité, qu’en Catilina; mais, s’il ne la regardait que comme une personne indifférente, dont il se sert pour cacher des armes dans sa cave, cette femme serait trop peu de chose. »