Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome5.djvu/451

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FREEPORT.

Allons, je veux entrer.

FABRICE.

Cela ne se peut pas.

FREEPORT.

Il faut bien que cela se puisse : où est la difficulté d’entrer dans une chambre ? Qu’on m’apporte chez elle mon chocolat et les gazettes. (Il tire sa montre.) Je n’ai pas beaucoup de temps à perdre : mes affaires m’appellent à deux heures.

(Il pousse la porte et entre.)


Scène VI.


LINDANE, paraissant tout effrayée ; POLLY la suit, FREEPORT, FABRICE.

LINDANE.

Eh, mon Dieu ! qui entre ainsi chez moi avec tant de fracas ? Monsieur, vous me paraissez peu civil, et vous devriez respecter davantage ma solitude et mon sexe.

FREEPORT.

Pardon. (À Fabrice.) Qu’on m’apporte mon chocolat, vous dis-je.

FABRICE.

Oui, monsieur ; si madame le permet.

(Freeport s’assied près d’une table, lit la gazette, et jette un coup d’œil sur Lindane et sur Polly : il ôte son chapeau et le remet.)

POLLY.

Cet homme me paraît familier.

FREEPORT.

Madame, pourquoi ne vous asseyez-vous pas quand je suis assis ?

LINDANE.

Monsieur, c’est que vous ne devriez pas l’être ; c’est que je suis très-étonnée ; c’est que je ne reçois point de visite d’un inconnu.

FREEPORT.

Je suis très-connu ; je m’appelle Freeport, loyal négociant, riche ; informez-vous de moi à la Bourse.

LINDANE.

Monsieur, je ne connais personne en ce pays-là, et vous me feriez plaisir de ne point incommoder une femme à qui vous devez quelques égards.