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ACTE I, SCÈNE IV. 509

Or.BASSAX.

Vous le devez, madame ; et, loin de m’opposer A de tels sentiments, dignes de mon estime, Loin de vous détourner d’un soin si légitime. Des droits que j’ai sur vous je craindrais d’a])user. J’ai quitté nos guerriers, je revole à leur tête : C’est peu d’un tel hymen, il le faut mériter. La victoire en rend digne ; et j’ose me flatter Que bientôt des lauriers en orneront la fête.

SCÈNE IV. ARGIRE, A3IÉNAÏDE.

A p. G IRE.

Vous semblez interdite ; et vos yeux pleins d’effroi, De larmes obscurcis, se détournent de moi. Vos soupirs étouffés semblent me faire injure : — HLa bouche obéit mal lorsque le cœur murmure.

A M ÉX AÏ DE.

Seigneur, je l’avouerai, je ne m’attendais pas

Qu’après tant de malheurs, et de si longs débats,

Le parti d’Orbassan dût être un jour le vôtre ;

Que mes tremblantes mains uniraient l’un et l’autre.

Et que votre ennemi dût passer dans mes bras.

Je n’oublierai jamais que la guerre civile

Dans vos propres foyers vous priva d’un asile ;

Que ma mère, à regret évitant le danger.

Chercha loin de nos murs un rivage étranger ;

Que des bras paternels avec elle arrachée,

À ses tristes destins dans Byzance attachée.

J’ai partagé longtemps les maux qu’elle a soufferts.

Au sortir du berceau j’ai connu les revers :

J’appris sous une mère, abandonnée, errante,

A supporter l’exil et le sort des proscrits,

L’accueil impérieux d’une cour arrogante.

Et la fausse pitié, pire que les mépris.

Dans un sort avili noblement élevée,

De ma mère bientôt cruellement privée,

Je me vis seule au monde, en proie à mon eft’roi,

Roseau faible et tremblant, n’ayant d’appui que moi.