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542 T ANCRE DE.

Est plus mon ennemi que celui de l’État.

Je le hais plus que vous : mais, quoi qu’il en puisse être.

Sachez que je suis prêt pour ce nouveau combat.

CATANE.

Nous attendons beaucoup d’une telle vaillance ; Attendez tout aussi de la reconnaissance Que devra Syracuse à votre illustre bras.

TANCRÈDE,

Il n’en est point pour moi, je n’en exige pas ;

Je n’en veux point, seigneur ; et cette triste enceinte

N’a rien qui désormais soit l’objet de mes vœux.

Si je verse mon sang, si je meurs malheureux.

Je ne prétends ici récompense ni plainte,

Ni gloire ni pitié. Je ferai mon devoir ;

Solamir me verra, c’est là tout mon espoir.

LORÉDAN.

C’est celui de l’État ; déjà le temps nous presse. Ne songeons qu’à l’objet qui tous nous intéresse, À la victoire ; et vous, qui l’allez partager. Vous serez averti quand il faudra vous rendre Au poste où Tennemi croit bientôt nous surprendre. Dans le sang musulman tout prêts à nous plonger, Tout autre sentiment nous doit être étranger. Ne pensons, croyez-moi, qu’à servir la patrie,

(Los chevaliers sortent.) TANCRÈDE.

Qu’elle en soit digne ou non, je lui donne ma vie.

SCÈNE II.

TANCRÈDE, ALDAMON.

ALDAMON.

Ils ne connaissent pas quel trait envenimé Est caché dans ce cœur trop noble et trop charmé. Mais, malgré vos douleurs, et malgré votre outrage. Ne remplirez-vous pas l’indispensable usage De paraître en vainqueur aux yeux de la beauté Qui vous doit son honneur, ses jours, sa liberté. Et de lui présenter de vos mains triomphantes D’Orbassan terrassé les dépouilles sanglantes ?