Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome6.djvu/117

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

*Nous découvre un autel de guirlandes paré :
*Je vois des deux côtés les prêtresses paraître ;
*Au fond du sanctuaire est assis le grand-prêtre ;
*Olympie et Cassandre arrivent à l’autel !



Scène IV

Cassandre, Olympie.

Les trois portes du temple sont ouvertes. On découvre tout l’intérieur. Les prêtres d’un côté, et les prêtresses de l’autre, s’avancent lentement. Ils sont tous vêtus de robes blanches, avec des ceintures bleues dont les bouts pendent à terre. Cassandre et Olympie mettent la main sur l’autel ; Antigone et Hermas restent dans le péristyle avec une partie du Peuple qui entre par les côtés.[1]

Cassandre

Dieu des rois et des dieux, être unique, éternel !
Dieu qu’on m’a fait connaître en ces fêtes augustes,

  1. Ce spectacle ferait peut-être un bel effet au théâtre, si jamais la pièce pouvait être représentée. Ce n’est pas qu’il y ait aucun mérite à faire paraître des prêtres et des prêtresses, un autel, des flambeaux, et toute la cérémonie d’un mariage : cet appareil, au contraire, ne serait qu’une misérable ressource si d’ailleurs il n’excitait pas un grand intérêt, s’il ne formait pas une situation, s’il ne produisait pas de l’étonnement et de la colère, dans Antigone, s’il n’était, pas lié avec les desseins de Cassandre, s’il ne servait à expliquer le véritable sujet de ses expiations. C’est tout cela ensemble qui forme une situation. Tout appareil dont il ne résulte rien est puéril. Qu’importe la décoration au mérite d’un poëme ? Si le succès dépendait de ce qui frappe les yeux, il n’y aurait qu’a montrer des tableaux mouvants. La partie qui regarde la pompe du spectacle est sans doute la dernière ; on ne doit pas la négliger, mais il ne faut pas trop s’y attacher. Il faut que les situations théâtrales forment des tableaux animés. Un peintre qui met sur la toile la cérémonie d’un mariage n’aura fait qu’un tableau assez commun s’il n’a peint que deux époux, un autel, et des assistants ; mais s’il y ajoute un homme dans l’attitude de l’étonnement et de la colère, qui contraste avec la joie des deux époux, son ouvrage aura de la vie et de la force. Ainsi, au second acte, Statira qui embrasse Olympie avec des larmes de joie, et l’hiérophante attendri et affligé ; ainsi, au troisième acte, Cassandre reconnaissant Statira avec effroi, et Olympie dans l’embarras et dans la douleur ; ainsi, au quatrième acte, Olympie au pied d’un autel, désespérée de sa faiblesse, et repoussant Cassandre qui se jette à ses genoux ; ainsi, au cinquième, la même, Olympie s’élançant dans le bûcher, aux yeux de ses amants épouvantés et des prêtres, qui, tous ensemble, sont dans cette attitude douloureuse, empressée, égarée, qui annonce une marche précipitée, les bras étendus, et prêts à courir au secours : toutes ces peintures vivantes, formées par des acteurs pleins d’âme et de feu, pourraient donner an moins quelque idée de l’excès où peuvent être poussées la terreur et la pitié, qui sont le seul but, la seule constitution de la tragédie. Mais il faudrait un ouvrage