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PRÉFACE

DE L’ÉDITEUR


Cette tragédie, assez ignorée, m’étant tombée entre les mains, j’ai été étonné d’y voir l’histoire presque entièrement falsifiée, et cependant les mœurs des Romains, du temps du triumvirat, représentées avec le pinceau le plus fidèle.

Ce contraste singulier m’a engagé à la faire imprimer avec des remarques que j’ai faites sur ces temps illustres et funestes d’un empire qui, tout détruit qu’il est, attirera toujours les regards de

vingt royaumes élevés sur ses débris, et dont chacun se vante

aujourd’hui d’avoir été une province des Romains, et une des

pièces de ce grand édifice. Il n’y a point de petite ville qui ne cherche à prouver qu’elle a eu l’Iionneur autrefois d’être saccagée par quelque consul romain, et on va même jusqu’à supposer des titres de cette espèce de vanité humiliante. Tout vieux château dont on ignore l’origine a été bâti par César, du fond de l’Espagne au bord du Rhin : on voit partout une tour de César, qui ne fit élever aucune tour dans les pays qu’il subjugua, et qui préférait ses camps retranchés à des ouvrages de pierre et de ciment, qu’il n’avait pas le temps de construire dans la rapidité de ses expéditions. Enfin les temps des Scipion, de Sylla, de César, d’Auguste, sont beaucoup plus présents à notre mémoire que les premiers événements de nos propres monarchies. Il semble que nous soyons encore sujets des Romains.

J’ose dire dans mes notes ce que je pense de la plupart de ces hommes célèbres, tels que César, Pompée, Antoine, Auguste, Caton, Cicéron, en ne jugeant que par les faits, et en ne me préoccupant pour personne. Je ne prétends point juger la pièce. J’ai fait une étude particulière de l’histoire, et non pas du théâtre, que je connais assez peu, et qui me semble un objet de goût plutôt que

1. Cet éditeur est Voltaire lui-même. Sa Préface était dans l’édition originale dont j’ai parlé dans une note ci-dessus. (B.j