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AVERTISSEMENT

POUR LA PRÉSENTE ÉDITION.

Le 12 septembre 1767, Voltaire écrit à Damilaviile : « Malgré mes maux, je-JCûIégaye à voir embellir, par des acteurs qui valent mieux que moi, une comédiiS (c’était Chariot, ou la comtesse de Givry) qui ne mérite pas leurs peines. » Le 18, il écrit à d’Argental : « Vous aurez incessamment Chariot, ou la comtesse de Givry dont je fais plus de cas que de Yhigénu, mais qui n’aura pas le même succès. Je ne la destine pas aux comédiens, à qui je ne donnerai jamais rien après la manière barbare dont ils m’ont défiguré, et l’insolence qu’ils ont eue de mettre dans mes pièces des vers dont l’abbé Pellegrin et Danchet auraient rougi. D’ailleurs les caprices du parterre sont intolérables, et les Welches sont trop Welches. »

C’était la chute des Scythes que Voltaire avait sur le cœur.

Il envoie sa comédie au libraire Merlin, à « l’enchanteur Merlin «, comme il l’appelle, à titre de gratification : « Je crois que Merlin peut tirer, sans rien risquer, sept cent cinquante exemplaires, qu’il vendra bien. » (19 septembre, à Damilaviile.)

Et dès lors les lettres de Ferney apportent corrections sur corrections et variantes sur variantes.

Les premières représentations véritablement publiques de Chariot eurent lieu aux portes de Genève, au théâtre de Châtelaine qui appartenait à Voltaire : « Ceux qu’envoyait Genève, dit M. Desnoiresterres *, venaient bien plus pour faire du tapage que pour applaudir à l’ouvrage ou au jeu des acteurs. Un soir on représentait Char lot… La pièce fut reçue par des sifflets. On a prétendu que le patriarche, fou de rage, sortant son grand corps hors de la loge et brandissant sa canne avec fureur, aurait crié à ce parterre insolent : « Magnifiques et très-honorés seigneurs ! je suis chez moi, et si « vous ne vous tenez pas tranquilles, je vous fais administrer la plus ro- « buste volée que votre république ait jamais reçue ! » Cette verte algarade est mise par d’autres dans la bouche du chevalier de Beauteville, qui était plus autorisé à s’exprimer de cette façon catégorique, bien que nous ne voyions point quand il aurait eu l’occasion d’adresser à ces auditeurs remuants cette énergique semonce. »

1. Voltaire et Genève, p. 428.