Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome6.djvu/451

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Un bavard d’avocat, dans cette conjoncture,
Veut me persuader que j’ai pris sa future,
Et me vient menacer d’un procès criminel.
Garant peut me tirer de cet état cruel ;
Garant ne paraît point, il me laisse, il emporte
Jusqu’aux clefs de ma chambre, et je reste à la porte,
N’osant, dans mes terreurs, ni fuir, ni demeurer.
Ô sagesse ! À quel sort as-tu pu me livrer !
Voilà donc le beau fruit d’une étude profonde !
Ah ! si j’avais appris à connaître le monde,
Je ne me verrais pas au point où je me voi :
Mon libertin de frère est plus sage que moi.



Scène VI

Gourville L’Aîné, Picard
GOURVILLE L’AÎNÉ.

Qui frappe à coups pressés ? quel bruit ! quel tintamarre !
Que fait-on donc là-bas ? Est-ce une autre bagarre ?
Est-ce madame Aubert qui me vient harceler,
Pour mille écus comptant qu’on m’a fait stipuler ?

PICARD., accourant.

Ah ! Cachez-vous.

GOURVILLE L’AÎNÉ.

Quoi donc ?

PICARD.

Une mère affligée
Qui vient redemander une fille outragée…

GOURVILLE L’AÎNÉ.

Madame Aubert la mère ?

PICARD.

Un mari pris de vin
Qui prétend boire ici du soir jusqu’au matin…

GOURVILLE L’AÎNÉ.

Monsieur Aubert lui-même ?

PICARD.

Et qui veut qu’on lui rende
Sa belle et chère enfant que sa femme demande :
Tout retentit des cris de la dame en fureur ;
Ses regards seulement m’ont fait trembler de peur ;