Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome7.djvu/256

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

246 ÉPITR1- : DIvDILATOIRE.

(le loltros (]o son tomps pour lesquels il travaillait sans avoir pour objet la multitude. Il cii nomme dix ibis plus que je n’en désigne ; et l’Italie n’en trouva pas la liste trop longue. Il n’oublie point les dames illustres, dont le suffrage lui était si cher.

lîoiloau. cei)remier maître dans l’art difficile des vers français, Boileau, moins galant que l’Arioste, dit, dans sa belle épître à son ami. Tinimitable Racine* :

Et (qu’importe à nos vers que Porrin les iidinire, Que l’auteur de Jouas s’empresse pour les lire… Pourvu qu’ils puissent plaire au plus puissant des rois ; Qu’à Chantilly Condé les souffre quelquefois ; Qu’Engliien en soit touché ; que Colbert et Vivonno, Que La Rochefoucauld, Marsiilac, et t’omjjone, Et mille autres qu’ici je ne puis faire entrer, A leurs traits délicats se laissent pénétrer.

J’avoue que j’aime mieux \e3Ixccnas Virgiliiisque, dans Horace, que /C plus puissant des rois dans Boileau, parce qu’il est plus beau, ce me semble, et plus honnête de mettre Virgile et le premier ministre de l’empire sur la même ligne, quand il s’agit du goût, que de préférer le suffrage de Louis XIV et du grand Condé à celui des Coras et des Perrin, ce qui n’était pas un grand effort. Mais enfin, monsieur, vous voyez que depuis Horace jusqu’à Boileau, la plupart des grands poètes ne cherchent à plaire qu’aux esprits bien faits.

Puisque Boileau désirait avec tant d’ardeur l’approbation de l’immortel Colbert, pourquoi ne travaillerions-nous pas à mériter celle d’un homme qui a commencé son ministère mieux que lui, qui est beaucoup plus instruit que lui dans tous les arts que nous cultivons, et dont l’amitié vous a été si précieuse depuis longtemps, ainsi qu’à tous ceux qui ont eu le bonheur de le connaître- ? Pourquoi n’am])itionnerions-nous pas les suffrages de ceux qui ont rendu des services essentiels à la patrie, soit par une paix nécessaire, soit par de très-belles actions à la guerre, ou par un mérite moins brillant et non moins utile dans les ambassades, ou dans les parties essentielles du ministère ?

Si ce même Boileau travaillait pour plaire aux La Bochefou-

1. Épître VII, vers 87-88, 93-98.

2. M. Turgot. — Anno-Robert-Jacques Turgot, nommé contrôleur général des finances, le 24 août 1774, se démit de cette place en mars 1776. Il est mort en 1781.