Il écoute en secret ces obscurs imposteurs,
D'un esprit défiant détestables flatteurs,
Trafiquant du mensonge et de la calomnie,
Et couvrant la vertu de leur ignominie.
Quel emploi pour César ! Et quels soins douloureux !
Je le plains, je gémis... il fait deux malheureux...
Ah ! Que n'ai-je embrassé cette retraite austère
Où depuis mon hymen s'est enfermé mon père !
Il a fui pour jamais l'illusion des cours,
L'espoir qui nous séduit, qui nous trompe toujours,
La crainte qui nous glace, et la peine cruelle
De se faire à soi-même une guerre éternelle.
Que ne foulais-je aux pieds ma funeste grandeur !
Je montai sur le trône au faîte du malheur,
Aux yeux des nations victime couronnée,
Je pleure devant toi ma haute destinée ;
Et je pleure surtout ce fatal souvenir
Que mon devoir condamne, et qu'il me faut bannir.
Ici l'air qu'on respire empoisonne ma vie.
De Nicéphore au moins la sombre jalousie
Par d'indiscrets éclats n'a point manifesté
Le sentiment honteux dont il est tourmenté :
Il le cache au vulgaire, à sa cour, à lui-même,
Il sait vous respecter, et peut-être il vous aime.
Vous cherchez à nourrir une injuste douleur.
Que craignez-vous ?
Le ciel, alexis, et mon coeur.
Mais alexis Comnène aux champs de la Tauride
Tout entier à la gloire, au devoir qui le guide,
Sert l'empereur et vous sans vous inquiéter,
Fidèle à ses serments jusqu'à vous éviter.
Je sais que ce héros ne cherche que la gloire :
Je ne saurais m'en plaindre.
Il a par la victoire
Raffermi cet empire ébranlé dès longtemps.
Ah ! J'ai trop admiré ses exploits éclatants :