CHANT TROISIÈME
« Quand l’arrêt des destins eut, durant quelques jours,
À tant de cruautés permis un libre cours,
Et que des assassins, fatigués de leurs crimes,
Les glaives émoussés manquèrent de victimes,
Le peuple, dont la reine avait armé le bras,
Ouvrit enfin les yeux, et vit ses attentats.
Aisément sa pitié succède à sa furie :
Il entendit gémir la voix de la patrie.
Bientôt Charles lui-même en fut saisi d’horreur ;
Le remords dévorant s’éleva dans son cœur.
Des premiers ans du roi la funeste culture
N’avait que trop en lui corrompu la nature ;
Mais elle n’avait point étouffé cette voix
Qui jusque sur le trône épouvante les rois.
Par sa mère élevé, nourri dans ses maximes,
Il n’était point, comme elle, endurci dans les crimes.
Le chagrin vint flétrir la fleur de ses beaux jours ;
Une langueur mortelle en abrégea le cours :
Dieu, déployant sur lui sa vengeance sévère,
Marqua ce roi mourant du sceau de sa colère,
Et par son châtiment voulut épouvanter[1]
Quiconque à l’avenir oserait l’imiter.
- ↑ Voltaire a dit dans Artémire, acte II, scène iii :
Puisse dans l'avenir ta mort épouvanter
Les ministres des rois qui pourraient t'imiter !
Et dans Brutus, acte V, scène vii :
Par mon juste supplice il faut épouvanter
Les Romains, s'il en est qui puissent m'imiter.