Page:Voltaire - Dictionnaire philosophique portatif, 6e édition, tome 1.djvu/156

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L’INDIEN

Et qui sont, s’il vous plaît, ces traiteurs qui partagent votre nation dans l’art de boire & de manger ?

LE JAPONOIS

Il y a premièrement les Breuxeh,* [1] qui ne vous donneront jamais de boudin ni de lard ; ils sont attachés à l’ancienne cuisine ; ils aimeraient mieux mourir que de piquer un poulet ; d’ailleurs, grands calculateurs ; & s’il y a une once d’argent à partager entre eux & les onze autres cuisiniers, ils en prennent d’abord la moitié pour eux, & le reste est pour ceux qui savent le mieux compter.

L’INDIEN

Je crois que vous ne soupez guère avec ces gens-là.

LE JAPONOIS

Non ; il y a ensuite les pispates, qui certains jours de chaque semaine, & même pendant un temps considérable de l’année, aimeraient cent fois mieux manger pour cent écus de turbots, de truites, de soles, de saumons, d’esturgeons, que de se nourrir d’une blanquette de veau, qui ne reviendrait pas à quatre sous.

Pour nous autres canusi, nous aimons fort le bœuf, & une certaine pâtisserie qu’on appelle en Japonois du pudding. Au reste, tout le

  1. On voit assez que les Breuxeh sont les Hébreux, et sic de caeteris.[1765]