Page:Voltaire - Dictionnaire philosophique portatif, 6e édition, tome 2.djvu/151

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cent trente ans après ce déjeuner criminel. Les animaux, les plantes, qui n’avaient point mangé de ce fruit moururent dans le temps prescrit par la nature. L’homme est né pour mourir ainsi que tout le reste.

Enfin, la punition d’Adam n’entrait en aucune manière dans la loi juive. Adam n’était pas plus Juif que Persan ou Caldéen. Les premiers chapitres de la Genèse (en quelque temps qu’ils fussent composés) furent regardés par tous les savants juifs comme une allégorie, & même comme une fable très-dangereuse, puisqu’il fut défendu de la lire avant l’âge de vingt-cinq ans.

En un mot, les Juifs ne connurent pas plus le péché originel que les cérémonies chinoises ; & quoique les théologiens trouvent tout ce qu’ils veulent dans l’Écriture ou totidem verbis, ou totidem litteris, on peut assurer qu’un théologien raisonnable n’y trouvera jamais ce mystère surprenant.

Avouons que Saint Augustin accrédita le premier cette étrange idée, digne de la tête chaude & romanesque d’un Africain débauché & repentant, manichéen & chrétien, indulgent & persécuteur, qui passa sa vie à se contredire lui-même.

Quelle horreur, s’écrient les unitaires rigides, que de calomnier l’auteur de la nature jusqu’à lui imputer des miracles continuels pour damner à jamais des hommes qu’il fait naître pour si peu de temps ! ou il a créé les ames de