Page:Voltaire - Dictionnaire philosophique portatif, 6e édition, tome 2.djvu/30

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

il suffirait d’un mot pour le détromper.

On est surpris du nombre prodigieux de déclamations débitées dans tous les temps contre l’idolâtrie des Romains, & des Grecs ; & ensuite on est plus surpris encor quand on voit qu’ils n’étaient pas idolâtres.

Il y a des temples plus privilégiés que les autres. La grande Diane d’Éphèse avait plus de réputation qu’une Diane de village. Il se faisait plus de miracles dans le temple d’Esculape à Épidaure, que dans un autre de ses temples. La statue de Jupiter Olimpien attirait plus d’offrandes que celle de Jupiter Paphlagonien. Mais puisqu’il faut toujours opposer ici les coutumes d’une religion vraie, à celles d’une religion fausse, n’avons-nous pas eu depuis plusieurs siècles plus de dévotion à certains autels qu’à d’autres ? Ne portons-nous pas plus d’offrandes à Notre-Dame de Lorette, qu’à Notre-Dame des Neiges ? C’est à nous à voir si on doit saisir ce prétexte pour nous accuser d’idolâtrie ?

On n’avait imaginé qu’une seule Diane, un seul Apollon, un seul Esculape ; non pas autant d’Apollons, de Dianes & d’Esculapes qu’ils avaient de temples & de statues. Il est donc prouvé, autant qu’un point d’histoire peut l’être, que les anciens ne croyaient pas qu’une statue fût une divinité, que le culte ne pouvait être rapporté à cette statue, à cette idole, & que par conséquent les anciens n’étaient point idolâtres.