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gnorant & l’affligé[1]. C’eſt-à-dire donc que nos jeunes-gens inſtruits à l’école de nos prétendus Sages, ſeroient vertueux & pourroient être à la fois impudiques, fornicateurs, adulteres, ivrognes, raviſſeurs &c. Voila ſans doute un genre de vertu des plus aimables ! C’eſt-à-dire que nos jeunes-gens ne ſeroient ni ſuperſtitieux ni fanatiques, parce que leurs paſſions vivroient ſans contrainte, & qu’ils auroient la liberté de choiſir entre les différents ſyſtêmes d’impiété, Pirroniſme, Matérialiſme, Déiſme &c. C’eſt-à-dire qu’ils verroient de ſang froid les vices & les égaremens de leurs ſemblables afin de pouvoir compter ſur une indulgence réciproque. De tels éleves ſeroient dignes de tels maîtres ; mais formeroient-ils une ſociété d’hommes ? Un Citoyen d’Athènes rencontrant un jour Ariſtipe ſur les bords de la mer, le pria de donner des leçons de ſageſſe à ſes deux fils ; très volontiers, répondit le Philoſophe ; l’Athénien lui ayant demandé de quelle Secte il étoit, vous allez le ſavoir, lui dit-il : regarder la volupté comme le ſouverain bien ; vivre ſelon les plaiſirs de la nature ; ne point gêner les paſſions des autres ; voila l’abrégé de ma Philoſophie. Comment ? malheureux, repartit le Citoyen tout en colere, veux-tu

  1. Ibid. pag. 342.