Nous appelons ame, ce qui anime. Nous n’en savons guères davantage, grace aux bornes de notre intelligence. Les trois quarts du genre humain ne vont pas plus loin, & ne s’embarrassent pas de l’être pensant ; l’autre quart cherche, personne n’a trouvé ni ne trouvera.
Pauvre pédant, tu vois une plante qui végète, & tu dis végétation, ou même, ame végétative. Tu remarques que les corps ont & donnent du mouvement, & tu dis Force ; tu vois ton chien de chasse apprendre sous toi son métier, & tu cries, instinct, ame sensitive : tu as des idées combinées, & tu dis Esprit.
Mais de grace, qu’entends-tu par ces mots, Cette fleur végète ? mais y a-t-il un être réel qui s’appelle végétation, ce corps en pousse un autre, mais possède-t-il en soi un être distinct qui s’appelle force ? ce chien te rapporte une perdrix, mais y a-t-il un être qui s’appelle instinct ? ne rirais-tu pas d’un raisonneur, (eût-il été précepteur d’Alexandre) qui te dirait, Tous les animaux vivent, donc il y a dans eux un être, une forme substantielle qui est la vie ?
Si une tulippe pouvait parler, & qu’elle te dit, Ma végétation & moi, nous sommes deux êtres joints évidemment ensemble, ne te moquerais-tu pas de la tulippe ?
Voyons d’abord ce que tu sais, & de quoi tu es certain ; que tu marches avec tes pieds, que tu digères par ton estomach, que tu sens par tout ton corps, & que tu penses par ta tête. Voyons si ta seule raison a pu te donner assez de