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Idole, Idolâtre, Idolâtrie.

d’adorer une fausse divinité représentée par ce bois & ce marbre. La différence entre eux & nous n’est pas qu’ils eussent des images & que nous n’en ayons point ; la différence est que leurs images figuraient des êtres fantastiques dans une religion fausse, & que les nôtres figurent des êtres réels dans une religion véritable. Les Grecs avaient la statue d’Hercule, & nous celle de St. Christophe : ils avaient Esculape & sa chèvre, & nous St. Roch & son chien ; Jupiter armé du tonnerre, & nous St. Antoine de Padoue, & St. Jacques de Compostelle.

Quand le consul Pline adresse les prières aux Dieux immortels, dans l’exorde du panégyrique de Trajan, ce n’est pas à des images qu’il les adresse ; ces images n’étaient pas immortelles.

Ni les derniers tems du paganisme, ni les plus reculés, n’offrent pas un seul fait qui puisse faire conclure qu’on adorât une idole. Homère ne parle que des Dieux qui habitent le haut Olimpe. Le Palladium, quoique tombé du ciel, n’était qu’un gage sacré de la protection de Pallas ; c’était elle qu’on vénérait dans le Palladium.

Mais les Romains & les Grecs se mettaient à genoux devant des statues, leur donnaient des couronnes, de l’encens, des fleurs, les promenaient en triomphe dans les places publiques. Nous avons sanctifié ces coutumes, & nous ne sommes point idolâtres.

Les femmes en tems de sécheresse portaient les statues des dieux, après avoir jeûné. El-