Page:Voltaire - La Raison par alphabet, 6e édition, Cramer, 1769, tome 1.djvu/353

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
347
Idole, Idolâtre, Idolâtrie.

sant qu’eux. Ils ont senti une force dans la terre qui fournit leurs alimens ; une dans l’air qui souvent les détruit ; une dans le feu qui consume, & dans l’eau qui submerge. Quoi de plus naturel dans des hommes ignorans que d’imaginer des êtres qui présidaient à ces élémens ? Quoi de plus naturel que de révérer la force invisible qui faisait luire aux yeux le soleil & les étoiles ? Et dès qu’on voulut se former une idée de ces puissances supérieures à l’homme, quoi de plus naturel encor que de les figurer d’une manière sensible ? Pouvait-on même s’y prendre autrement ? La religion juive qui précéda la nôtre, & qui fut donnée par Dieu même, était toute remplie de ces images sous lesquelles Dieu est représenté. Il daigne parler dans un buisson le langage humain ; il paraît sur une montagne. Les esprits célestes qu’il envoie viennent tous avec une forme humaine ; enfin le sanctuaire est rempli de chérubins, qui sont des corps d’hommes avec des aîles & des têtes d’animaux ; c’est ce qui a donné lieu à l’erreur de Plutarque, de Tacite, d’Appien, & de tant d’autres, de reprocher aux Juifs d’adorer une tête d’âne. Dieu malgré sa défense de peindre, & de sculpter aucune figure, a donc daigné se proportionner à la faiblesse humaine, qui demandait qu’on parlât aux sens par des images.

Isaïe dans le chap. VI. voit le Seigneur assis sur un trône, & le bas de sa robe qui remplit le temple. Le Seigneur étend sa main, & touche la bouche de Jérémie, au chap. I. de ce