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Du Christianisme.

Nous avons un évangile de Nicodème. Celui-là semble mériter une plus grande attention, parce qu’on y trouve les noms de ceux qui accusèrent Jésus devant Pilate ; c’étaient les principaux de la Synagogue, Anne, Caïphe, Sommas, Datam, Gamaliel, Juda, Nephtalim. Il y a dans cette histoire des choses qui se concilient assez avec les évangiles reçus, & d’autres, qui ne se voient point ailleurs. On y lit que la femme guérie d’un flux de sang s’appelait Véronique. On y voit tout ce que Jésus fit dans les enfers quand il y descendit.

Nous avons ensuite les deux lettres qu’on suppose que Pilate écrivit à Tibère touchant le supplice de Jésus ; mais le mauvais latin dans lequel elles sont écrites découvre assez leur fausseté.

On poussa le faux zèle jusqu’à faire courir plusieurs lettres de Jésus-Christ ; on a conservé la lettre qu’on dit qu’il écrivit à Abgare roi d’Édesse ; mais alors il n’y avait plus de roi d’Édesse.

On fabriqua cinquante évangiles, qui furent ensuite déclarés apocryphes. St. Luc nous apprend lui-même que beaucoup de personnes en avaient composé. On a cru qu’il y en avait un nommé l’Évangile éternel, sur ce qu’il est dit dans l’Apocalypse chap. 14. J’ai vu un ange volant au milieu des cieux, & portant l’Évangile éternel. Les cordeliers abusant de ces paroles au 13e siècle, composèrent un Évangile éternel, par lequel le règne