Page:Voltaire - Traité sur la tolérance 1763.djvu/139

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
129
Traité ſur la Tolérance. Chap. XIV.

l’épée ; il réprimande les enfants de Zébédée, qui, à l’exemple d’Élie, voulaient faire deſcendre le feu du Ciel ſur une Ville qui n’avait pas voulu le loger.

Enfin, il meurt victime de l’envie. Si l’on oſe comparer le ſacré avec le profane, & un Dieu avec un homme, ſa mort, humainement parlant, a beaucoup de rapport avec celle de Socrate. Le Philoſophe Grec périt par la haine des Sophiſtes, des Prêtres, & des premiers du Peuple : le Légiſlateur des Chrétiens ſuccomba ſous la haine des Scribes, des Phariſiens, & des Prêtres. Socrate pouvait éviter la mort, & il ne le voulut pas : Jésus-Christ s’offrit volontairement. Le Philoſophe Grec pardonna non ſeulement à ſes calomniateurs & à ſes Juges iniques, mais il les pria de traiter un jour ſes enfants comme lui-même, s’ils étaient aſſez heureux pour mériter leur haine comme lui : le Légiſlateur des Chrétiens, infiniment ſupérieur, pria ſon Père de pardonner à ſes ennemis.

Si Jésus-Christ ſembla craindre la mort, ſi l’angoiſſe qu’il reſſentit fut ſi extrême qu’il en eut une ſueur mêlée de ſang, ce qui eſt le ſymptôme le plus violent & le plus rare, c’eſt qu’il daigna s’abaiſſer à toute la faibleſſe du corps humain qu’il avait revêtu. Son corps tremblait, & ſon âme était inébranlable ; il nous apprenait que la vraie force, la vraie grandeur conſiſtent à ſupporter des maux ſous leſquels notre na-

I