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LETTRE
DE M. DE VOLTAIRE[1]

Parmi un grand nombre de lettres anonymes, j’en ai reçu une de Lyon, datée du 17 avril, commençant par ces mots : J’ose risquer une 95e lettre anomyme[2]. Je l’ai envoyée au ministère, qui fait réprimer ces délits, et qui est persuadé que tout écrivain de lettres anonymes est un lâche et un coquin : un lâche, parce qu’il se cache, et un coquin, parce qu’il trouble la société.

Cet homme, entre autres sottises, me reproche d’avoir dit qu’un nommé La Beaumelle est huguenot[3]. Je ne me souviens point de l’avoir dit, et je ne sais si on s’est servi de mon nom pour le dire. Il m’importe fort peu que l’on soit huguenot. Il est assez public que je n’ai jamais regardé ce titre comme une injure, et il n’est pas moins public que j’ai rendu des services assez importants à des personnes de cette communion. Mais ceux qui ont dit ou écrit que La Beaumelle était protestant et prédicant ne se sont certainement pas trompés, et l’auteur de la lettre anonyme a menti quand il a écrit le contraire.

On trouve dans les registres de la compagnie des ministres

  1. Tel est l’intitulé de cette pièce dans l’édition originale, in-8° de 4 pages. Elle a échappé à tous les éditeurs qui m’ont précédé ; cependant elle avait été réimprimée textuellement, et avec commentaire, à la page 98 du Tableau philosophique de l’esprit de M. de Voltaire (par Sabatier de Castres), 1771, in-8° et in-12. Malgré l’intitulé de cette pièce, je n’ai pu me décider à la classer dans la Correspondance, ne la regardant pas comme une missive. On trouvera dans ce volume un autre Mémoire contre La Beaumelle. (B.)
  2. Dans la XXe des Honnêtetés littéraires (voyez page 139), il est question d’une 94e lettre anonyme. Les Honnêtetés littéraires ont donc précédé la pièce que je donne aujourd’hui. (B.)
  3. Sabatier prétend que le nom d’huguenot a été donné vingt fois par Voltaire à La Beaumelle ; et il cite la lettre à Albergati Capacelli. Cela n’est point exact. Dans la lettre à Albergati Capacelli, du 23 décembre 1760, Voltaire a dit calviniste ; il n’y a pas employé le mot huguenot.