LE COMTE. — J’entends l’amour éclairé de la sagesse,
soutenu par l’amour de l’Être éternel, rémunérateur
de la vertu et vengeur du crime.
L’ABBÉ. — Eh bien ! n’est-ce pas là ce que notre
religion annonce ?
LE COMTE. — Si c’est là ce que vous annoncez,
nous sommes d’accord ; je suis bon catholique et
vous êtes bon philosophe ; n’allons donc pas plus
loin ni l’un ni l’autre. Ne déshonorons notre philosophie
religieuse et sainte, ni par des sophismes et
des absurdités qui outragent la raison, ni par la
cupidité effrénée des honneurs et des richesses qui
corrompent toutes les vertus. N’écoutons que les
vérités et la modération de la philosophie ; alors
cette philosophie adoptera la religion pour sa fille.
L’ABBÉ. — Avec votre permission, ce discours sent
un peu le fagot.
LE COMTE. — Tant que vous ne cesserez de nous
conter des fagots, et de vous servir de fagots allumés
au lieu de raisons, vous n’aurez pour partisans que
des hypocrites et des imbéciles. L’opinion d’un seul
sage l’emporte sans doute sur les prestiges des fripons,
et sur l’asservissement de mille idiots. Vous
m’avez demandé ce que j’entends par philosophie ;
je vous demande à mon tour ce que vous entendez
par religion.