Page:Voltaire Dialogues philosophiques.djvu/192

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
192
dialogues philosophiques

Si la chose était vraie, ils seraient les plus infâmes criminels de la terre. On vous a conté des histoires ridicules ; vous êtes un bon enfant et j’ai peur que vous ne soyez un imbécile, et cela me fâche.


LE FILS. — Mais, mon père, si on gagne la vie éternelle en donnant tout son bien à Simon Barjone, il est clair qu’on fait un bon marché.


ÉPICTÈTE. — Mon fils, la vie éternelle, la communication avec l’Être suprême n’a rien de commun, croyez-moi, avec votre Simon Barjone. Le Dieu très bon et très grand, Deus optimus maximus, qui anima les Caton, les Scipion, les Cicéron, les Paul-Émile, les Camille, le père des dieux et des hommes, n’a pas, sans doute, remis son pouvoir entre les mains d’un Juif. Je savais que ces misérables étaient au rang des plus superstitieux peuples de la Syrie, mais je ne savais pas qu’ils osassent porter leur démence jusqu’à se dire les premiers ministres de Dieu.


LE FILS. — Mais, mon père, ils font continuellement des miracles. (Ici le bonhomme Épictète ricane.) Vous ricanez, mon père, vous levez les épaules.


ÉPICTÈTE. — Hélas ! un mourant n’a guère envie de rire, mais tu m’y forces, mon pauvre enfant. As-tu vu des miracles ?