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dialogues philosophiques

morale quand elle ne se contredit point. Je ne peux souffrir qu’on lui fasse dire : « Je ne suis pas venu apporter la paix, mais le glaive. » Ces paroles sont affreuses. Un homme sage, encore un coup, n’a pu dire que le royaume des cieux est semblable à un grain de moutarde, à des noces, à de l’argent qu’on fait valoir par usure ; ces paroles sont ridicules. J’adopte cette sentence : « Aimez Dieu et votre prochain. » C’est la loi éternelle de tous les hommes, c’est la mienne ; c’est ainsi que je suis ami de Jésus ; c’est ainsi que je suis chrétien. S’il a été un adorateur de Dieu, ennemi des mauvais prêtres, persécuté par des fripons, je m’unis à lui, je suis son frère.


LE DOUTEUR. — Il n’y a jamais eu de religion qui n’en ait dit autant que Jésus, qui n’ait recommandé la vertu comme Jésus.


L’ADORATEUR. — Eh bien donc ! je suis de la religion de tous les hommes, de celle de Socrate, de Platon, d’Aristide, de Cicéron, de Caton, de Titus, de Trajan, d’Antonin, de Marc-Aurèle, d’Épictète, de Jésus.

Je dirai avec Épictète : « C’est Dieu qui m’a créé ; Dieu est au-dedans de moi, je le porte partout ; pourquoi le souillerais-je par des pensées obscènes, par des actions basses, par d’infâmes désirs ? Je réunis en moi des qualités dont chacune m’impose un devoir ; homme, citoyen du monde, enfant de Dieu, frère de tous les hommes, fils, mari, père ; tous