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Page:Vontade - La Lueur sur la cime.pdf/218

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serions moins seuls chez moi : ma jeune bonne adore écouter aux portes, c’est une manie congénitale, on n’y peut rien. Et puis ça tient peut-être à ce qu’elle a l’oreille à hauteur de serrure.

— Je suis allé deux fois chez vous sans vous rencontrer. Vous l’a-t-on dit ?

— Je suis souvent dehors. J’ai des masses de leçons.

— Qu’y a-t-il, Léo ?

— Pourquoi demandez-vous ça ?

— Ah ! vous avez pris des façons de femme ! Vous questionnez au lieu de répondre… Je vous demande ça parce que vous parlez pour faire du bruit devant votre pensée. Parce que vous n’avez pas de plaisir à me voir. Parce que vous êtes maigre, et que vous avez l’air obsédé.

— Je vais très bien. Au moins, je le suppose. Mais si j’ai un air singulier, vous ne me le cédez en rien, et vous avez une mine !…

— Je viens de voyager très vite… j’ai des ennuis.

— Quoi !

– Ce sont des choses qui n’appartiennent pas qu’à moi. Vous ne vous trompiez pas quand vous disiez que je n’étais pas adaptable à ce que je voulais faire… Je renonce.

– Tant mieux ! Vous avez des regrets ?

— Non, de la fatigue et un écœurement !… Tenez, regardez — il désignait le buste en marbre de la « femme inconnue » devant lequel ils étaient arrivés en marchant par les salles — croyez-vous que ça ne vaut pas mieux que toutes les rêvasseries qu’on fait pour le perfectionnement de l’humanité ? Être un bon ouvrier