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Page:Vontade - La Lueur sur la cime.pdf/314

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Elle organisa des réunions de petites filles qu’elle convoqua au château pour apprendre, sous la direction de sa femme de chambre, des ouvrages d’aiguille qui devaient leur permettre de gagner leur vie moins rudement qu’au travail des champs. Il y eut des séances régulières de couture et de broderie, et des jeux dans le terrain du tennis. Puis elle s’occupa de la guérison d’un alcoolique dont les mauvaises façons perturbaient le voisinage ; enfin elle fonda un hospice pour dix vieilles femmes impotentes, y plaça des Sœurs, prit beaucoup de peine. Les créations destinées au plus bel avenir commencent souvent assez mal ; il en alla ainsi, dans la circonstance. Les petites filles témoignèrent d’un médiocre génie de la couture fine, mais saccagèrent les fleurs du jardin et commirent des vols de fruits et de légumes. L’alcoolique, trop brusquement sevré, eut des crises épileptiformes qui nécessitèrent son transport dans l’hôpital de la ville voisine. Quant aux vieilles femmes, leur impotence masquait une perversité singulière qui éclata en furieux conflits dès qu’elles furent réunies. Jacqueline eut tant de tracas pour rétablir l’ordre qu’elle eût sans doute rendu ces antiques furies à leurs familles respectives et mis la clef sur la porte de son hospice, si les moqueries dont ses tentatives étaient l’objet de la part de ses invités ne l’eussent fortifiée du goût de la contradiction.

Vers la fin de septembre, elle se prépara avec une joie sincère à quitter les plaisirs ruraux pour passer quelques jours à Paris. La sœur cadette de madame Steinweg épousait le marquis de Mascrée, et la belle morphinomane, dans la propriété de qui le