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Page:Vontade - La Lueur sur la cime.pdf/93

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restaurant tourbillonnaient avec des clameurs rudes, tiraillés par les devoirs antagonistes de servir les clients et de ranger les vaisselles qui devaient le lendemain être expédiées vers d’autres lieux. Des verres heurtaient des assiettes, et des mots criés très haut se rencontraient. On s’appelait de loin, on croisait des adieux avec les amis qui prenaient le train de onze heures pour Nürnberg. Il y avait des contestations véhémentes autour des places envahies. Un brouhaha énorme remuait une odeur de bière dans l’air épaissi.

Les Moustiers et madame Simpson eurent quelque peine à joindre leur table. Ils étaient arrêtés à chaque pas. La belle madame Steinweg désirait raconter la syncope qu’elle avait eue par excès d’émotion en écoutant « l’enchantement du Vendredi Saint ». Albert Marlette, essayait un commencement de conférence sur Jacqueline qui, cherchant des yeux Léonora et Hansen, ne l’écoutait pas ; les Audichamp, ayant repris le goût de vivre, au dernier accord de Parsifal, insistaient pour organiser avec M. des Moustiers une excursion vers les châteaux de Louis II : « On avait besoin de s’aérer, après toute cette musique… oh ! admirable, certainement, tout à fait admirable, mais un peu fatigante !… »

Jacqueline, très pâle, les yeux cerclés, l’air absent, répondait par monosyllabes distraits, avec un sourire de migraine.

Depuis une semaine, laissant ensemble madame Simpson et André, elle avait passé des heures à marcher dans la campagne avec Léonora. Erik Hansen les rejoignait toujours à quelque point de la course. Ils causaient interminablement et Jacqueline prenait