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SAINT ANTOINE

a déjà effacés. Mais, si vous en connaissez qu’Antoine ait commis depuis qu’il est moine, dites-les ! » Et, comme les diables se taisaient, Antoine put librement s’élever dans les airs et en redescendre.

III. Saint Antoine raconte qu’il a vu, un jour, certain diable de haute taille qui, osant se faire passer pour la Providence divine, lui dit : « Que veux-tu, Antoine, afin que je te le donne ? » Mais le saint, s’armant de sa foi, lui cracha au visage, se jeta sur lui, et aussitôt le diable s’évanouit. Une autre fois le diable lui apparut dans un corps d’une taille si haute que sa tête semblait toucher le ciel. Antoine lui ayant demandé qui il était, il avoua qu’il était Satan, et ajouta : « Pourquoi les moines me combattent-ils, et pourquoi les chrétiens me maudissent-ils ? » Et Antoine : « Ils ont raison de le faire, car tu ne cesses de les tourmenter ! » Et le diable : « Ce n’est pas moi qui les tourmente, mais ce sont eux qui se tourmentent eux-mêmes : car moi je ne puis plus rien, depuis que le règne du Christ s’est répandu sur toute la terre. »

IV. Quelqu’un demanda à saint Antoine : « Que dois-je faire pour plaire à Dieu ? » Et le saint lui répondit : « Où que tu ailles, aie toujours Dieu devant les yeux ; quoi que tu fasses, obéis aux préceptes de la Sainte Écriture ; et, dans quelque lieu que tu te trouves, restes-y ! Fais ces trois choses, et tu seras sauvé ! » Un abbé ayant demandé, lui aussi, à saint Antoine ce qu’il devait faire, le saint répondit : « Ne te fie pas à ta justice, contiens ton ventre et ta langue, et, quand une chose est passée, ne la regrette pas ! » Et il dit encore : « De même que les poissons meurent si on les met à sec, de même les moines qui s’attardent hors de leur cellule et fréquentent les séculiers se relâchent de leur bon propos. » Et il dit encore : « Celui qui vit dans la solitude est délivré de trois guerres, à savoir : contre l’ouïe, la vue et la parole, et n’a à lutter que contre son cœur. »

V. Saint Antoine disait que les mouvements du corps pouvaient être de trois sortes : les uns provenant de la nature même, les autres de l’excès d’aliments, d’autres