Page:Voragine - Légende dorée.djvu/195

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royal, et le faisait pleurer : sur quoi la reine, qui savait qu’il n’était pas son fils, le faisait très souvent battre à son tour. Mais rien ne parvenait à corriger le méchant enfant. Un jour enfin toute la vérité se découvrit, et l’on sut que Judas n’était pas le vrai fils du roi. Alors Judas, plein de honte et de jalousie, tua secrètement le vrai fils du roi, son frère supposé. Puis, craignant d’en être puni, il s’enfuit avec ses familiers à Jérusalem, où le préfet Pilate (tant on a raison de dire que qui se ressemble s’assemble) reconnut en lui un caractère pareil au sien, et se prit pour lui d’une vive affection.

Voilà donc Judas régnant en maître à la cour de Pilate ; Et un jour, Pilate, considérant un champ de pommes voisin de son palais, éprouva un extrême désir de goûter aux pommes de ce champ. Or ce champ appartenait à Ruben, le père de Judas ; mais ni Judas ne connaissait son père, ni celui-ci ne savait que Judas était son fils. Et Judas, voyant le désir de Pilate, entra dans le champ et cueillit des pommes. Et comme Ruben le surprit, tous deux commencèrent par s’injurier, puis en vinrent aux coups ; et Judas finit par tuer Ruben en le frappant d’une pierre sur la nuque. Après quoi il porta les pommes à Pilate et lui raconta ce qui s’était passé. Et lorsque la mort de Ruben fut connue, Pilate donna à son favori Judas tous les biens du mort, et le maria avec la veuve de celui-ci, qui n’était autre que sa mère Ciborée.

Un soir, Ciborée soupirait si tristement que Judas, son nouveau mari, lui demanda ce qu’elle avait. Elle lui répondit : « Hélas ! je suis la plus malheureuse de toutes les femmes ! J’ai dû noyer mon unique enfant, on m’a tué mon mari, et, pour comble de misère, Pilate m’a forcée à me remarier malgré mon deuil ! » Elle raconta alors l’histoire de l’enfant ; et Judas lui raconta toutes ses aventures ; et ils découvrirent ainsi que Judas avait tué son père et épousé sa mère. Alors, sur le conseil de Ciborée, le misérable voulut faire pénitence, et, étant allé trouver Notre-Seigneur Jésus-Christ, il implora de lui le pardon de ses péchés. Voilà ce qu’on lit dans cette histoire apocryphe. Doit-on tenir pour vraie ou