Page:Voragine - Légende dorée.djvu/291

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avertissement ! » Sur quoi elle étrangla son fils, le fit cuire, en mangea la moitié, et cacha l’autre moitié. Or, voici que les pillards, sentant une odeur de viande cuite, se précipitèrent dans la maison et menacèrent la femme de la tuer si elle ne leur livrait sa provision de viande. Alors la femme, leur montrant les membres de son enfant : « Tenez, leur dit-elle, je vous ai réservé la meilleure partie ! » Une telle horreur les envahit qu’ils ne surent que répondre. Et elle : « C’est mon fils, leur dit-elle, le péché est sur moi : mangez sans crainte, puisque moi-même, qui l’ai mis au monde, en ai mangé la première ; et si l’horreur vous retient, j’achèverai seule de manger ce dont j’ai déjà mangé la moitié ! »

Enfin, la seconde année du règne de Vespasien, Titus prit Jérusalem, détruisit le temple de fond en comble ; et, de même que les Juifs avaient acheté le Christ pour trente deniers, de même Titus ordonna qu’on vendît trente Juifs pour un seul denier. Josèphe raconte que quatre-vingt-dix-sept mille Juifs furent vendus, et que onze mille périrent par la faim ou le fer. On raconte encore que Titus, en entrant à Jérusalem, aperçut un mur plus épais que les autres ; il y fit pratiquer une ouverture, et l’on vit derrière le mur un vieillard d’aspect vénérable qui, aux questions qu’on lui posa, répondit qu’il s’appelait Joseph, qu’il était de la ville d’Arimathie, et que les Juifs l’avaient enfermé et muré là parce qu’il avait enseveli le corps du Christ. Il ajouta que, depuis lors, il avait été nourri et soutenu par des anges descendant du ciel. Mais, d’autre part, l’évangile de Nicodème nous dit que Joseph d’Arimathie, ayant été muré par les Juifs, avait été délivré par le Christ et ramené par lui dans sa ville natale. Après cela, rien n’empêche d’admettre que, revenu à Arimathie, Joseph ait continué à prêcher le Christ et ait été muré par les Juifs une seconde fois.

À la mort de Vespasien, Titus succéda à son père sur le trône : homme plein de clémence et de générosité, dont Eusèbe de Césarée et Jérôme nous rapportent que, certain jour, se rappelant qu’il n’avait fait ce jour-là aucune bonne action, il s’est écrié : « Ô mes amis, j’ai perdu ma