Page:Voragine - Légende dorée.djvu/309

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étant accouru sur la place publique, il vit les bienheureux martyrs, l’un pendu avec du feu sous les pieds, un autre étendu sur un chevalet, un autre labouré d’ongles de fer, un autre les mains coupées ; et tandis que, brûlant lui-même de l’amour du Christ, il considérait ces supplices divers, il se mit à invoquer le Dieu des martyrs. Puis, s’approchant d’eux, il s’assit à leurs pieds, baisa leurs chaînes, et dit : « Martyrs du Christ, foulez aux pieds le démon, prenez patience ! votre peine n’est rien en comparaison du repos et de la joie qui vous attendent ! » Ce qu’entendant, le juge Simplicius le fit mander à son tribunal et lui dit : « Qui es-tu ? » Le saint répondit : « Je me nomme Boniface, et je suis chrétien. » Alors le juge, irrité, le fit prendre, et ordonna qu’on labourât son corps de pointes de fer jusqu’à mettre à nu tous ses os. Il ordonna ensuite qu’on introduisît des aiguillons sous les ongles de ses doigts. Et comme le martyr, les yeux levés au ciel, se réjouissait parmi tous ces tourments, le méchant juge ordonna qu’on lui ouvrît la bouche et qu’on y versât du plomb bouillant. Mais le martyr répétait toujours : « Je te rends grâces, Seigneur Jésus ! » Alors le juge le fit plonger, la tête en bas, dans une cuve de poix bouillante ; et, comme, de cela non plus, le martyr ne souffrait aucun mal, le juge ordonna qu’il eût la tête tranchée. Et à l’instant où on lui trancha la tête, se produisit un grand tremblement de terre, qui convertit nombre d’infidèles en leur montrant la vertu du Christ.

Cependant, les autres serviteurs d’Aglaé, qui avaient accompagné Boniface, allaient par la ville, en quête de lui, et, ne le trouvant pas, se disaient : « Sûrement il sera occupé à quelque adultère, ou à s’enivrer dans quelque cabaret ! » Comme ils parlaient, ils rencontrèrent dans la rue un des officiers impériaux. Ils lui demandèrent : « N’aurais-tu pas vu ici un étranger, un Romain ? » Il leur répondit : « Hier, sur la place, un étranger a eu la tête tranchée. » Ils lui dirent : « Quelle figure avait-il ? l’homme que nous cherchons est trapu et solide, avec une chevelure abondante, et vêtu d’un manteau rouge. »