Page:Voragine - Légende dorée.djvu/396

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s’élança hors de sa cabane, mais il ne trouva personne. Et, de nouveau, lorsqu’il rentra chez lui, la même voix l’appela. Mais, cette fois encore, étant sorti, il ne trouva personne. Enfin, sur un troisième appel, il vit un enfant qui le pria de l’aider à traverser le fleuve. Christophe prit l’enfant sur ses épaules, s’arma de son bâton, et entra dans l’eau pour traverser le fleuve. Mais voilà que, peu à peu, l’eau enflait, et que l’enfant devenait lourd comme un poids de plomb ; et sans cesse l’eau devenait plus haute et l’enfant plus lourd, de telle sorte que Christophe crut bien qu’il allait périr. Il parvint cependant jusqu’à l’autre rive. Et, y ayant déposé l’enfant, il lui dit : « Ah ! mon petit, tu m’as mis en grand danger ; et tu as tant pesé sur moi que, si j’avais porté le monde entier, je n’aurais pas eu les épaules plus chargées ! » Et l’enfant lui répondit : « Ne t’en étonne pas, Christophe ; car non seulement tu as porté sur tes épaules le monde entier, mais aussi Celui qui a créé le monde. Je suis en effet le Christ, ton maître, celui que tu sers en faisant ce que tu fais. Et, en signe de la vérité de mes paroles, quand tu auras franchi le fleuve, plante dans la terre ton bâton, près de ta cabane : tu le verras, demain matin, chargé de fleurs et de fruits. » Sur quoi l’enfant disparut ; et Christophe, ayant planté son bâton, le retrouva, dès le matin suivant, transformé en un beau palmier plein de feuilles et de dattes.

II. Il eut, plus tard, l’occasion de se rendre à Samos, ville de Lycie ; et, comme il ne comprenait pas la langue des habitants, il se mit en prière, pour demander à Dieu l’intelligence de cette langue. Et lorsqu’il l’eut obtenue, il se couvrit le visage, se rendit au cirque, et se mit à réconforter les chrétiens qu’on y torturait. Alors un des juges le frappa au visage. Et Christophe, se découvrant, lui dit : « Si je n’étais chrétien, je vengerais aussitôt une telle injure ! » Puis il planta en terre son bâton et pria le Seigneur d’y faire pousser des feuilles, pour que ce miracle convertît le peuple. Le miracle se produisit en effet, et huit mille hommes se convertirent.

Alors le roi envoya vers lui deux cents soldats, pour