Page:Voragine - Légende dorée.djvu/401

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
368
la légende dorée

au marché. Il entendit que tous y nommaient le Christ, et sa stupeur ne connut point de bornes. « Est-ce possible, demanda-t-il, que, dans cette ville où personne hier n’osait nommer le Christ, chacun le nomme librement aujourd’hui ? Et, d’ailleurs, cette ville n’est pas Éphèse, car les bâtiments y sont tout autres ; et cependant le lieu est le même, et il n’y a point d’autre ville aux environs ! » On lui dit que cette ville était bien Éphèse ; et peu s’en fallut que, se croyant fou, il ne s’en retournât aussitôt vers ses compagnons. Mais il voulut, tout de même, acheter du pain ; et le boulanger à qui il s’adressa considéra avec surprise les pièces de monnaie qu’il lui présentait. On lui demanda s’il avait découvert un trésor ancien. Et Malchus, persuadé qu’on allait le traîner devant l’empereur, supplia qu’on le laissât partir, sauf à garder l’argent et les pains. Mais les marchands, le retenant, lui dirent : « D’où es-tu, et où as-tu trouvé le trésor des anciens empereurs ? Dis-nous-le, pour que nous partagions avec toi : sinon, nous te dénoncerons ! » Et comme Malchus, épouvanté, ne savait que répondre, on lui passa une corde au cou, et on le traîna par les rues de la ville, et chacun se répétait que ce jeune homme avait découvert un trésor. En vain Malchus scrutait des yeux la foule, espérant y trouver un visage connu. Il ne voyait que des faces nouvelles ; et sa stupéfaction le rendait muet.

Ce qu’apprenant, l’évêque saint Martin et le proconsul Antipater le firent amener devant eux avec ses pièces d’argent et lui demandèrent où il avait trouvé ces vieilles pièces de monnaie. Il leur répondit qu’il n’avait rien trouvé, et que ces pièces venaient de la bourse de ses parents. On lui demanda d’où il était. Et lui : « Hé, d’ici, à moins que cette ville ne soit pas Éphèse ! » Et le proconsul : « Fais venir tes parents, pour qu’ils te reconnaissent ! » Il nomma ses parents : personne ne les connaissait. Et le proconsul : « Comment prétends-tu nous faire croire que cet argent te vienne de tes parents, quand les inscriptions qu’il porte sont vieilles de près de quatre cents ans, datant des