Page:Voragine - Légende dorée.djvu/458

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

son vivant, s’approcha de saint Laurent et de sainte Agnès, et leur demanda de lui pardonner. Ils intercédèrent donc pour lui, et la sainte Vierge se joignit à eux : si bien qu’ils obtinrent que son âme revînt dans son corps afin que, pendant trente jours, il pût faire pénitence. La Vierge lui imposa, en outre, de réciter tous les jours un psaume. Après quoi il fut rendu à la vie ; mais, tant qu’il vécut, son bras resta noir et tordu, comme si c’était son véritable corps qui eût souffert. Et, après avoir restitué tout ce qu’il avait pris, et fait pénitence pendant trente jours, il rendit son âme au Seigneur.

VII. Enfin on lit dans la vie de l’empereur Henri que, ce prince et sa femme Cunégonde ayant toujours vécu dans la chasteté, le diable persuada au mari que sa femme le trompait avec un de ses officiers : et l’empereur, furieux, ordonna que Cunégonde eût à marcher, pieds nus, sur des charbons ardents. Or Cunégonde, avant de commencer l’épreuve, s’écria : « Toi qui sais que Henri ni personne n’ont touché mon corps, Christ, secours-moi ! » Et Henri, poussé par la jalousie, la frappa au visage ; mais elle entendit une voix qui lui disait : « Vierge, la Vierge Marie te délivrera ! » Puis elle marcha sur les charbons ardents sans ressentir aucun mal.

Quand Henri mourut, un ermite vit passer devant sa cellule une foule de démons, qui lui dirent qu’ils allaient assister au jugement de l’empereur, afin d’essayer de se le faire adjuger. Mais bientôt l’ermite vit revenir les démons, qui lui racontèrent qu’ils avaient perdu leur peine, car, lorsqu’ils avaient mis dans la balance le soupçon conjugal d’Henri et ses autres péchés, saint Laurent était survenu, et avait mis dans l’autre plateau de la balance un grand calice d’or qui avait fait contre-poids : ce dont les diables avaient été si furieux, qu’ils avaient brise une des oreilles du calice. Et en effet, l’empereur défunt avait fait don à l’église d’Einstetten, en l’honneur de saint Laurent, pour qui il avait une dévotion particulière, d’un grand calice d’or massif. Et l’on put constater, que, le jour de la mort de l’empereur, une des anses de ce calice se trouva brisée.