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en gage de reconnaissance. Et bientôt la masse de ces cadeaux fut telle qu’elle encombra la chapelle tout entière ainsi que tout le porche, au point de rendre la circulation difficile autour du tombeau. Forcés par la nécessité, les moines firent transporter cette masse de cadeaux en un autre endroit.




CXXIII


SAINTE THÉODORE[1]
(28 août)


Théodore, femme d’illustre maison, demeurait à Alexandrie, sous le règne de l’empereur Zenon. Elle était mariée à un homme riche et qui craignait Dieu ; mais le diable, jaloux de sa sainteté, excita dans l’âme d’un autre citoyen d’Alexandrie le désir de la posséder, de telle sorte que cet homme ne cessait point de l’importuner de ses instances et de ses présents, qu’elle repoussait toujours dédaigneusement. Enfin cet homme envoya vers elle une magicienne qui l’engagea à avoir pitié de lui et à se livrer à lui. Et comme Théodore répondait que, vivant sous l’œil de Dieu qui voyait toutes choses, jamais elle ne se résoudrait à commettre un aussi grand péché, la magicienne lui dit : « Tout ce qui se fait dans le jour, Dieu le voit et le sait ; mais ce qui se fait le soir, après le coucher du soleil, Dieu l’ignore ! » Sur quoi la dame, trompée par ce mensonge, se laissa toucher de pitié, et fit dire à l’homme qui l’aimait qu’elle l’autorisait à venir la voir après le coucher du soleil. L’homme n’eut garde d’y manquer : il vint le soir, entra dans le lit de Théodore, et puis s’en alla. Mais Théodore, revenant à elle, pleurait amèrement et se frappait au visage, disant : « Hélas ! hélas ! j’ai perdu


  1. L’Église fête, en ce même jour, une autre sainte Théodore, vierge et martyre, qui est, comme l’on sait, l’héroïne d’une des plus belles tragédies de Corneille.