Page:Voragine - Légende dorée.djvu/620

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l’invoquait, les lui mit dans les mains, et l’entraîna au dehors, sans que personne osât lui résister.

VI. Il y a eu encore un autre saint Léonard, également moine et plein de vertu, dont le corps repose aujourd’hui dans la ville de Corbigny. Celui-là, étant abbé de son monastère, s’humiliait au point d’apparaître comme le dernier des moines. Son exemple entraînait tant de vocations que des envieux le dénoncèrent au roi Clotaire, disant à celui-ci que, s’il n’y mettait bon ordre, Léonard finirait par dépeupler son royaume. Le roi, trop crédule, envoya à Corbigny une troupe pour chasser Léonard de son monastère. Mais à peine ces soldats eurent-ils vu et entendu le saint que, touchés, ils demandèrent à devenir ses disciples. Alors le roi, pénitent, vint demander pardon au saint, et priva de leurs honneurs ceux qui l’avaient dénoncé ; mais Léonard, intercédant pour eux, obtint leur grâce. Il obtint aussi de Dieu, comme l’autre saint Léonard, la permission de faire tomber les chaînes de ceux qui invoqueraient son nom. Et un jour qu’il était en prière, un grand serpent sortit de terre à ses pieds, et rampa le long de son corps. Mais Léonard n’en acheva pas moins sa prière ; après quoi il s’écria : « Je sais que, depuis la création, tu tourmentes les hommes autant que cela t’est possible. Mais si, maintenant, Dieu m’a livré à toi, inflige-moi la punition que j’ai méritée ! » Et aussitôt le serpent, sortant par son capuchon, s’étendit mort à ses pieds.

Un jour de l’année du Seigneur 570, saint Léonard, après avoir tranché une querelle entre deux évoques, annonça qu’il mourrait le jour suivant ; et en effet c’est ce jour-là qu’il rendit son âme à Dieu.