Page:Voragine - Légende dorée.djvu/714

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

crainte. » Ce qu’entendant, tous les prisonniers rendirent grâce à Dieu, car ils comprirent qu’ils avaient été élus pour le martyre. Amenés devant le juge, ils refusèrent de sacrifier : sur quoi le juge fit séparer les trois hommes des deux femmes, et dit à Félicité : « As-tu un mari ? » Et elle : « Oui, mais je le dédaigne ! » Et lui : « Aie pitié de toi, jeune femme, et consens à vivre, d’autant plus que tu portes un enfant dans ton ventre ! » Mais elle : « Fais de moi ce que tu voudras, jamais tu ne m’amèneras à ta volonté ! » Cependant, les parents et le mari de Perpétue avaient amené à celle-ci son petit garçon encore à la mamelle. Et le père de la sainte dit à sa fille : « Mon doux enfant, aie pitié de moi, de ta pauvre mère, et de ton mari, qui ne pourra pas vivre sans toi ! » Mais Perpétue ne se laissait point toucher. Alors son père lui jeta au cou son petit garçon. Mais elle, repoussant l’enfant, dit aux siens : « Éloignez-vous de moi, ennemis de Dieu, car je ne vous connais plus ! » Après quoi le préfet, voyant la constance des martyrs, les renvoya en prison. Et comme les saints s’affligeaient sur Félicité, qui était alors enceinte de huit mois, Dieu fit alors en sorte qu’elle éprouva soudain les douleurs de l’enfantement, et mit au monde un fils vivant. Et les gardiens lui disaient : « Si tu souffres si cruellement dès à présent, que sera-ce quand tu comparaîtras devant le juge ? » Mais Félicité : « Ici, je souffre pour moi ; là-bas Dieu souffrira pour moi ! » On les fit ensuite sortir de prison, les mains liées derrière le dos, et on les conduisit dans l’amphithéâtre. Satire et Perpétue furent dévorés par des lions, Révocat et Félicité par des léopards ; et Saturnin eut la tête tranchée. Cela se passait vers l’an 256, sous les empereurs Valérien et Gallien.