Page:Voragine - Légende dorée.djvu/716

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mine la cause suivant ta loi ; et, s’il est digne de mort, mets-le à mort ; s’il est innocent, fais-en ce qui te plaira ! » Pasteur disait à ses frères : « Pour être libre de ce monde, le moine n’a qu’à détester deux choses. » Et comme un de ses frères lui demandait ce que c’était, il répondit : « La jouissance charnelle et la vaine gloire. Si tu veux trouver le repos dans ce monde et dans l’autre, dis-toi toujours : qui suis-je ? Et ne juge personne ! » Un frère d’un couvent ayant commis une faute, l’abbé, sur le conseil d’un ermite, le chassa. Or, comme ce frère s’enfuyait, désespéré, Pasteur l’appela, le consola, et lui demanda d’aller chercher l’ermite qui l’avait dénoncé. Et à cet ermite il dit : « Il y avait deux hommes, dont chacun venait de perdre son fils. Et voici que l’un des deux abandonna son propre mort pour aller pleurer le mort de l’autre ! » L’ermite comprit la parabole, et se repentit. Une autre fois, un frère dit à Pasteur qu’il voulait s’en aller, parce qu’on lui avait rapporté, d’un de ses frères, des choses qui l’avaient scandalisé. Pasteur, lui répondit de ne pas croire ces choses, qui n’étaient pas vraies. Et le frère. : « Pardon, elles sont vraies, car c’est le frère Fidèle qui me les a rapportées ! » Et Pasteur : « Celui qui te les a rapportées ne saurait être Fidèle ; car, s’il était fidèle, il ne songerait pas à dénoncer ses frères ! » Et le frère : « Mais je l’ai vu aussi de mes propres yeux ! » Et Pasteur : « Sais-tu ce que c’est qu’une paille et qu’une poutre ? Eh bien, mets-toi dans l’esprit que tes péchés à toi sont comme une poutre, et ceux de ton frère comme un fétu de paille ! »

Un frère qui avait commis un grand péché voulut faire pénitence pendant trois ans. Mais d’abord il demanda à Pasteur si c’était beaucoup. Et Pasteur : « C’est beaucoup ! » Le frère demanda si un an de pénitence serait suffisant. Et Pasteur : « C’est beaucoup ! » On en vint à proposer quarante jours ; mais Pasteur dit encore : « C’est beaucoup ! » Et il ajouta : « J’estime que si un homme se repent de tout son cœur, et se promet de ne pas recommencer son péché, Dieu se contente parfaitement d’une pénitence même de trois jours. »