Page:Voyage A L'Ile-De-France ; Tome Second.pdf/188

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

teurs. Ceux-ci abandonnent même leurs laborieux et stériles travaux pour le lucratif métier de raisonner, à tort et à travers, sur ceux d'autrui.

MOI.

Vous avez raison. Mais ce genre de littérature a aussi son utilité. Combien de citoyens, occupés de leurs affaires, ne sont pas à portée de savoir ce qui se passe en politique, dans les lettres et dans les arts! ils trouvent dans les journaux des connaissances tout acquises, qui n'exigent de leur part aucune réflexion. L'âme a besoin de nourriture comme le corps; et il est remarquable que le nombre des journaux s'est accru, chez nous, à mesure que celui des sermons y a diminué.

MON AMI.

Et c'est par cela même que je les trouve dangereux. En donnant des raisonnemens tout faits, ils ôtent la faculté de raisonner, et celle d'être juste, par des jugemens dictés souvent par l'esprit de parti. Ils paralysent à la fois les esprits et les consciences. Ceux qui les lisent habituellement, s'accoutument à les recommander comme des oracles. Entrez dans nos cafés, et voyez la quantité de gens qui oublient leurs amis, leur commerce et leur famille, pour se livrer à cette oisive occupation. Qu'en rapportent-ils chez eux? quelque maxime de morale? quelque principe de conduite? non; mais un sarcasme bien mordant