Page:Voyage A L'Ile-De-France ; Tome Second.pdf/70

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Cette vue me rendait les promenades de nuit très-agréables. Un soir, à 10 heures, comme je me promenais sur le gaillard d'arrière, je vis le contre-maître parler avec beaucoup d'agitation à l'officier de quart. Celui-ci fit allumer une lanterne, et le suivit sur le gaillard d'avant. Je m'y acheminai comme eux. Nous ne fûmes pas peu étonnés de voir sortir de l'écoutille un torrent de fumée noire et épaisse. Les matelots de quart étaient couchés tranquillement sur une voile en avant du mât de misaine, et quand on les eut appelés, ils furent saisis de frayeur. Les plus hardis descendirent par l'écoutille avec la lanterne, en criant que nous étions perdus. Nous nous occupâmes à chercher des seaux de tous côtés, mais nous n'en trouvâmes pas un seul. Les uns voulaient sonner la cloche pour appeler tout le monde, d'autres voulaient faire jouer la pompe de l'avant pour en porter l'eau, à tout hasard dans l'entrepont.

Nous étions tous rangés, la tête baissée, autour de l'écoutille, en attendant notre arrêt. La fumée redoublait, et nous vîmes même briller de la flamme. Dans le moment, une voix sortit de cet abîme, et nous dit que c'était le feu qui avait pris à du bois qu'on avait mis sécher dans le four. Cet instant d'inquiétude nous parut un siècle. Triste condition des marins! au milieu du plus beau temps, dans la sécurité la plus parfaite, au moment de revoir la patrie, un misérable acci-