Page:Wagner - À Mathilde Wesendonk, t2, 1905, trad. Khnopff.djvu/137

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gaspiller de l’éloquence, du chagrin, de la colère, de la fureur : — la seule réponse que j’obtienne, c’est un sourire de regret pour une mauvaise humeur momentanée. Si les gens pouvaient alors deviner la signification de mon silence quand je m’arrête soudain, et pâle, avec l’air indifférent, rentré en moi-même !

Ô mon enfant ! Où donc trouverai-je alors ma seule et unique consolation ?… J’ai trouvé, un jour, le cœur et l’âme qui dans ces moments-là me comprenaient à fond et auxquels j’étais devenu cher, justement, parce qu’ils m’avaient compris et devaient me comprendre ainsi ! Voyez, je me réfugie alors vers cette âme ; mort de fatigue, je m’abandonne et m’abîme dans la douce et pure atmosphère de cette créature amie. Toutes les épreuves, les émotions, les soucis, les douleurs inouïes de ce passé se fondent, comme une nuée d’orage, en une rosée rafraîchissante, qui mouille mes tempes en feu : alors j’éprouve un rafraîchissement, et le repos enfin, le doux repos : je suis aimé, — reconnu !…

Et ce repos, je vous l’offre ! Dans l’heureuse conscience de ce que vous êtes pour moi — l’ange de mon repos, la gardienne de ma vie — trouvez aussi la noble source qui arrose les déserts de votre existence ! Partagez mon repos et recevez-le tout entier aujourd’hui, comme j’en jouis en ce moment où je m’abîme