Page:Wagner - À Mathilde Wesendonk, t1, 1905, trad. Khnopff.djvu/128

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Bientôt nous nous reverrons !…
      Au revoir !…
Jour de toutes les âmes !
      Au revoir !
Et garde-moi ton affection ! —


24 Novembre. Venise.

Karl[1] m’a quitté pour quelque temps, afin d’aller féliciter, à l’occasion de son anniversaire, sa mère malade. Il reviendra sous peu. Son départ m’a fortement ému. L’étrange garçon avait peine à me quitter. Je pense bien que quiconque a beaucoup pu me voir, ces mois derniers gardera de moi une belle impression. Je n’ai jamais été aussi clair en tout que maintenant, et l’amertume a pour ainsi dire absolument disparu. Celui qui sait bien n’avoir plus à chercher, mais rien qu’à donner, celui-là est réconcilié avec le monde tout entier, car son éloignement consistait seulement, en ce qu’il cherchait quelque chose, là où rien ne pouvait lui être donné. Comment est-on arrivé à cette force merveilleuse du don ? Certes uniquement parce qu’on ne veut plus rien pour soi-même. Celui qui comprend, que l’unique bonheur intense auquel un cœur profond tienne, ne peut être donné par le

  1. Karl Ritter, fils de Madame Ritter, amie et bienfaitrice de Wagner (voir Lettres de Wagner à ses amis de Dresde — traduction de G. Khnopff (édit. Juven, Paris).
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