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Page:Wagner - Dix Écrits, 1898.djvu/198

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DIX ÉCRITS DE RICHARD WAGNER

je prévois quelle expression de sombre énergie il saura donner à cette scène où Caspar cherche à enlacer son jeune ami dans ses séductions diaboliques, où il le presse de faire le premier essai des balles-franches, où il cherche à l’enrôler sous les bannières de l’enfer, où il lui adresse ces paroles empreintes d’une profonde méchanceté : Lâche, ce n’est qu’aux dépens d’autrui que tu voudrais gagner le prix ! Crois-tu peut-être que tu n’es pas déjà coupable ? penses-tu que le coup que tu viens de tirer te sera remis ? Je suis sûr qu’à ce passage, de bruyants applaudissements récompenseront les magnifiques inspirations de M. Berlioz ; mais j ’ai aussi la certitude qu’après le récitatif, l’air de Caspar, qui suit, ne produira point l’effet qu’on devait en attendre. De cette façon vous aurez quelque chose d’entièrement nouveau, de merveilleux, si vous voulez ; et nous qui connaissons le Freischütz, qui n’avons pas besoin de récitatif supplémentaire pour le comprendre, nous verrons avec plaisir les œuvres de Berlioz augmentées d’une création nouvelle ; mais nous doutons que l’on vous ait fait comprendre le Freischütz. Vous jouirez d’une musique tour à tour gracieuse et terrible, qui flattera vos oreilles et vous donnera de profondes émotions ; vous entendrez exécuter dans une admirable perfection des Lieder que jusqu’ici on vous avait assez médiocrement chantés ; une belle déclamation dramatique pleine de grandes pensées vous