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Page:Wagner - Dix Écrits, 1898.djvu/254

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DIX ÉCRITS DE RICHARD WAGNER

tique sombre et insidieuse du Conseil des Dix, et qui se répète en légers échos dans différents endroits de la partition, se fait remarquer de plus par un certain vide dans l’harmonie, avec lequel le chant si animé, si entraînant d’Andréa : Eh quoi ! vouloir qu'ainsi je brise, forme un beau contraste, et complète le tableau caractéristique que présente cette scène.

Le finale du premier acte, où toutes les passions se déchaînent comme une tempête, est un de ces chefs-d’œuvre où le talent d’Halévy se déploie dans toute sa puissance. L’énergie grandiose avec laquelle le compositeur a coutume d’exprimer les violentes émotions de l’âme, se concentre ici dans un air magnifique pour voix de basse : dans les premières notes, la colère des partisans de Gérard se peint avec force et fierté ; puis le mouvement rythmique s’accélère de plus en plus, et exprime admirablement l’exaltation successive de la passion. Sous le rapport purement musical, le finale offre d’ailleurs une foule de traits nouveaux.

Le commencement du second acte, qui nous montre le côté romantique de Venise, est une des conceptions les plus originales qui soient jamais sorties de la plume d’Halévy. L’introduction musicale avec le pizzicato incessant et monotone des violoncelles, et les accords pleins de rêverie des instruments à vent, forme, avec le chœur des gondoliers, un ensemble qui nous enivre d’un