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nauté constituaient sa préocupation : mais ceux-ci étaient satisfaits par le patriote, l’homme d'État, l'artiste, non pas l’ouvrier. Pour partager les plaisirs de la communauté, le Grec sortait d’un intérieur simple, sans faste : il lui aurait paru honteux et bas de se Iivrer, derrière les murs somptueux d’un palais privé, à l’opulence et aux voluptés raffinées qui constituent aujourd’hui toute l’essence de la vie d’un héros de la bourse : car en ceci le Grec se distinguait précisément du barbare orientalisé égoïste. Il pourvoyait à l’entretien de son corps dans les bains et les gymnases publics communs. Les vêtements, d’une noble simplicité, étaient l’objet de soins artistiques principalement de la part des femmes, et partout où il se heurtait à la nécessité du travail manuel, il avait la faculté naturelle d’en dégager le côté artistique et de l’élever à la hauteur d’un art. Les plus grossières des occupations domestiques, il s’en déchargeait sur l’esclave.

Cet esclave est devenu maintenant l’axe fatal des destinées du monde. L’escIave, par sa simple existence d’esclave estimée nécessaire, a dévoilé la vanité et l’instablité de toute la beauté et de toute la force de l’humanisme particulariste des Grecs, et a démontré à tout jamais que la beauté et la force comme fondements de la vie sociale ne peuvent créer un