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Page:Wagner - La Tétralogie de l’Anneau de Nibelung, 1894.djvu/43

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AVANT-PROPOS DU TRADUCTEUR

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toutes les formes admises et même obligées de grand opéra proprement dit (1) », des introductions, des finales, des chœurs, des airs, des duos, des trios, tout en y déployant « toute la richesse possible (2) ». Et comment Rienzi eût-il, quand on y pense, marqué « aucune phase essentielle dans le développement des vues sur l’Art (3) » qui, plus tard, dominèrent Wagner ? Conçu en Allemagne et commencé là, « sous l’empire de l’émulation » excitée en lui par les impressions, « les jeunes Impressions » dont l’avaient « rempli », tantôt l’ample style « héroïque » des opéras d’un Spontini, tantôt le « genre brillant », trop brillant, du Grand Opéra parisien, d’où lui arrivaient des ouvrages portant les noms fameux d’Auber, de Meyerbeer et d’Halévy (4), - Rienzi ne fut- il pas achevé, quant à la partie musicale, pendant le premier séjour de Wagner à Paris ? Les représentations du Grand Opéra, la per- fection de l’exécution, les splendeurs de la mise en scène, pouvaient-elles manquer d’éblouir (5), alors, un artiste jeune, arrivant d’Allemagne, accoutumé, comme chef d’orchestre, aux ridicules misères d’un guignol de Riga, et, circonstance plus périlleuse, en quête de la direction propre à donner à ses facultés ? Mais aussi cet éblouissement, la première stupeur dissipée, devait nécessairement, par le contraste même, contribuer à révéler, au sens artistique de Wagner, l’indigence musicale, - ci-dessous déterminée, - et la pauvreté poétique d’un genre, qui n’éveillait en lui, somme toute, que des sensations d’ordre assez grossier. Qu’en Allemagne la Juive l’eût enflammé si peu, tandis qu’à l’Opéra la Juive l’ « éblouissait », quoi

(1) Lettre sur la Musique, nouv. éd., p. LVII.

(2) Id., ibid.

(3) Id., p. LVI.

(4) Id., ibid.

(5) Id., p. XX.