Page:Wagner - Quinze Lettres, 1894, trad. Staps.djvu/12

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ment de la fusion de tous les arts parvenus à leur degré suprême d’intensité, le drame est dans l’âme même du maître, dans la phase douloureuse et fatale du sentiment et de la sensation purs ; c’est le dedans qu’il éclaire et l’homme s’en dégage avec sa puissante originalité et son naïf abandon, avec ses contradictions et ses faiblesses, ses impatiences et ses colères, ses grands élancements vers ce que le vulgaire appelle l’impossible et ses lourdes chutes de l’illusion dans le réel, l’homme que l’immensité de ses aspirations et l’acharnement du sort revêtent en ce moment d’une grandeur tragique et rendent si semblable à quelqu’un de ses héros. — Lui aussi n’a-t-il pas lancé un fier défi aux puissances établies, n’a-t-il pas à lutter contre une mer furieuse et tous les ports ne lui sont-ils pas fermés ? Pour que sa voie soit libre et qu’il puisse aborder en la terre de son Désir, il faut qu’un miracle se fasse ! — Ce miracle, l’amour le fait deux fois pour lui : la faveur et le dévouement d’un roi l’enlèvent par-delà les tempêtes dans le ciel de ses rêves et donnent la paix à