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SOUVENIRS

semblaient exiger des graves et consciencieux Allemands qu’ils se rendissent maîtres des procédés plus heureusement choisis et perfectionnés de leurs rivaux, afin d’arriver à l’emporter décidément sur eux par la production de vraies œuvres d’art.

J’avais alors vingt et un ans ; j’étais disposé à prendre plaisir à la vie, à trouver satisfaction au spectacle des choses ; Ardinghello et la Jeune Europe[1] me mettaient le diable

  1. La Jeune Europe. Dans l’énumération des ouvrages les plus connus du littérateur Heinrich Laube, dont il est question plus haut, figure le titre suivant : la Jeune Europe (1833-1837), 4 volumes (Mannheim). — Ardinghello est un roman de Heinse (Joh.-Jak.-Wilh.), né en 1749, à Langewiesen (Thuringe) ; étudia le droit à léna et les belles-lettres à Erfurt sous la direction de Wieland ; se rendit, en 1776, à Düsseldorf, où il collabora avec Jacobi à la rédaction du journal l’Iris, visita l’Italie de 1780 à 1783, puis obtint l’emploi de bibliothécaire de l’électeur de Mayence ; mourut en 1803. On loue dans Ardinghello (1787) un style d’une énergie admirable et d’un coloris brillant, mais on y blâme une trop grande licence. On cite de lui un autre roman, Hildegard de Hohenthal (1795), des Épigrammes, une traduction de Pétrone, Laïdion ou les Mystères d’Eleusis (1773), Anastasie ou Lettres sur l’Italie (1803), une Correspondance, publiée à Zurich (1808), enfin, des lettres à Gleim, sortes de Salons, où il rend compte et fait la critique des galeries de tableaux de Düsseldorf. Ses ouvrages se font remarquer, paraît-il, par un mélange d’images et de considérations artistiques, par une sensualité très ardente, qui le rapprochent de notre Diderot. Ses œuvres complètes ont été éditées à Leipzig en 1838 (10 vol.), par les soins de Laube.